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Coronavirus : « Le catastrophisme annoncé, reflet de notre vision de l’Afrique »

Tribune. Face au Covid-19, de bonnes et de mauvaises raisons orientent la commune déraison des projections alarmistes sur l’Afrique, que précède la « réputation » de ce continent. Il était donc attendu ou redouté que l’Afrique et ses systèmes de santé « fragiles » soient le lieu d’une gigantesque oraison funèbre. Cela relève simultanément de l’histoire des pandémies du XXe siècle et d’une curieuse absence de bon sens. Les raisons d’avoir tiré la sonnette d’alarme se heurtent à des représentations de l’Afrique, de sa place dans le monde, entre l’habitus du catastrophisme et la paresse intellectuelle qui veut voir et trouver l’Afrique à la place du mort. Comme si, dans les représentations du monde, l’Afrique était confinée dans le rôle du berceau de la mort et des maux dont on ne guérit pas sans intervention extérieure et « humanitaire ».

Les raisons de craindre le pire sont nombreuses et les faits qui y résistent s’empilent, le tout au cœur d’incertitudes qui jalonnent la marche de cette pandémie. La bien-pensance médiatique a oublié un truisme que le Covid-19 met sèchement en lumière : on ne meurt pas deux fois. Les populations africaines sont plus jeunes que celles des autres régions du monde. C’est le résultat d’une tragédie banalisée : la faiblesse de l’espérance de vie. Cet indicateur morbide devient un atout face au Covid-19, dont la létalité chez les personnes âgées est une des caractéristiques. Avantage ou conséquence d’une tragédie, la situation du Covid-19 génère des discours saturés d’a priori, y compris lorsque ces discours partent de bons sentiments ou d’inquiétudes pavloviennes. Il faut d’abord prendre acte des faits et accepter l’évidence qui n’a pas l’air d’aller de soi aux yeux du monde : les Africains sont des êtres humains ordinaires. Les anciens sont plus fragiles que les jeunes, partout.