Interview FinDev

responsAbility et ses pairs regroupent leurs forces pour promouvoir le prêt responsable

Gaëlle Bonnieux, Head of Agriculture Debt Financing

Gaëlle Bonnieux, Head Agriculture Investing chez responsAbility.

Fondé en 2012, le Council on Smallholder Agricultural Finance (CSAF) est une alliance des principaux prêteurs à l’agriculture qui se focalise sur les besoins des petites entreprises en pleine croissance du secteur agricole des pays en développement et des économies émergentes. Dans cette interview, Gaëlle Bonnieux, Head Agriculture Investing chez responsAbility – l’un des membres fondateurs de CSAF – parle des réalisations de l’organisation à ce jour et souligne ses prochains objectifs.

Pourquoi responsAbility s’est-il associé à d’autres organisations pour lancer CSAF ?

Notre but était de capitaliser les expériences récoltées au cours des dix dernières années afin de contribuer à améliorer l’accès au financement d’organisations agricoles, qui achètent les produits de petits paysans, et à soutenir la croissance du marché, tout en assurant des pratiques responsables en matière de prêts. responsAbility a commencé à investir dans l’agriculture il y a une décennie. Depuis, les investissements dans ce secteur ont pris leur essor, sous l’impulsion de la croissance de la population et de l’augmentation de la demande de nourriture ainsi que de la hausse des revenus et des changements intervenus dans l’alimentation. Un nombre grandissant d’entreprises réalisent que leur croissance future repose sur la résilience des producteurs et sur la durabilité des terres cultivables. Même s’il existe encore de vastes lacunes dans le financement de ce secteur, la moitié environ des 658 entreprises financées par les membres du CSAF sont également en relation avec d’autres membres de ce dernier. Il est par conséquent important d’instaurer un dialogue entre eux (afin de coordonner leurs activités de financement, en évitant les doublons pour leur permettre d’atteindre un plus grand nombre d’emprunteurs).

Quelles étaient précisément vos attentes concernant cette organisation ? 

Quand CSAF a été créé, le premier objectif était que les membres fondateurs puissent partager leurs expériences, échanger des informations et définir les meilleures pratiques dans ce secteur. Puis, le Conseil a commencé à organiser et à coordonner les activités impliquant les membres dans des domaines où il y avait un terrain d’entente clairement défini. Il en est résulté trois axes d’intervention: la croissance du marché, des pratiques de prêt responsables et l’impact. Pour chaque axe, le CSAF a désigné une organisation chargée de piloter les travaux.

S’agissant de la croissance du marché, quels ont été les accomplissements du CSAF ? 

CSAF pensait prêter collectivement 500 millions USD par an, à compter de 2016, à des entreprises agricoles se situant dans le «chaînon manquant», c.-à-d. celles à la recherche d’un financement se situant entre 25 000 et 2 millions USD, une fourchette qui n’est pas couverte ni par la microfinance à un bout, ni par les banques commerciales à l’autre. En 2014, les membres du CSAF ont déjà dépassé cet objectif en distribuant pour 564 millions USD de prêts à un total de 658 petites et moyennes entreprises. Ce qui représente une hausse de 56% par rapport à 2013. Les membres du CSAF ont également étendu leur couverture géographique et celle des matières premières. Ils investissent dans pas moins de 64 pays et 61 produits agricoles. En outre, pour accroître la sensibilisation à ce sujet clé, CSAF a organisé, au premier semestre 2015 en association avec Twin, une formation de sensibilisation à la gestion des risques de prix dispensée à soixante chargés des investissements et gestionnaires des risques travaillant dans des organisations membres du CSAF aux Pays-Bas, au Pérou et au Kenya.

Comment les membres du CSAF collaborent-ils pour promouvoir des pratiques de prêt responsables ?

Les membres du CSAF ont élaboré une série de Principes des prêts responsables ainsi que des accords et protocoles modèles entre créanciers, destinés à coordonner la restructuration de la dette des clients non-productifs ayant obtenu du financement de plusieurs membres. Les organisations membres ont également partagé les politiques en matière de provisionnement des prêts et d’autres références de la performance financière. Enfin, en visant des impacts sociaux et environnementaux, ils ont élaboré des outils communs de due diligence, des lignes directrices en termes de souscription couvrant les secteurs sensibles du point de vue de la protection de l’environnement ainsi que des paramètres communs, s’engageant à établir des rapports annuels à ce sujet.

Quelle a été la contribution de responsAbility ?

responsAbility a joué un rôle majeur dans le développement du marché. Concrètement, les véhicules de placement gérés par responsAbility ont représenté 33% des sommes décaissées en 2014 et 19% des entreprises financées. En outre, responsAbility a pris le leadership dans la définition des accords et protocoles entre créanciers pour la restructuration de la dette et a contribué à organiser la formation en gestion des risques de prix.

Quels sont les sujets importants devant encore être traités dans un proche avenir ?

Les membres du CSAF souhaitent augmenter la part de la demande qu’ils peuvent satisfaire. En effet, si la demande de financement est énorme, celle-ci est limitée par les risques inhérents à l’agriculture, la faiblesse des infrastructures dans certains pays, le sous-développement des chaînes d’approvisionnement et de la capacité de comprendre les bases de la finance et parfois également par la non-conformité avec des critères sociaux et environnementaux. Améliorer l’accès à du financement à long terme est aussi prioritaire. Or, celui-ci ne s’est élevé qu’à 10% du total des décaissements en 2014. Certes, le financement à court terme est essentiel pour les opérations au quotidien, mais les organisations agricoles ont aussi besoin de financement à long terme pour investir dans des machines, des équipements et des bâtiments visant à améliorer la quantité, la qualité et l’efficacité de leur production.

Article initialement publié en octobre 2015 sur le site de responsAbility.

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